mardi 20 octobre 2015

Penny Dreadful (saison 2)

Note préalable : j'ai fait ce billet en deux parties, la première sans spoilers et la seconde avec plein de spoilers. Sachez vous arrêter !

J'ai enfin achevé de regarder la deuxième saison de Penny Dreadful et, comme la première, je la recommande chaudement !
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Peut-être est-ce parce que je suis particulièrement sensible à la littérature fantastique de cette époque et que j'y retrouve donc plein de repères, mais j'aime beaucoup l'ambiance de cette série. Et puis, j'aime bien aussi le traitement du thème abordé mille fois "les monstres ne sont pas forcément ceux qu'on croit"...
Eva Green et Timothy Dalton sont aussi bons que dans la première saison. Harry Treadaway est un bon docteur Frankenstein torturé, Billie Piper (Lily) , Reeve Carney (Gray) et Johnny Beauchamp (Angelique) sont très bien, la créature de Frankenstein bien en monstre triste.
Le personnage de Lyle est rigolo mais son ambiguïté aurait pu être mieux explorée, quant à Ethan Chandler, il n'amène guère qu'une possibilité de scènes d'action (peu de champ est laissé aux interrogations que pourrait initier sa nature) ; les confrontations avec l'inspecteur Rusk sont tout juste suffisantes pour donner de l'épaisseur au personnage. Et son côté bestial, on va dire, n'est pas très réussi, visuellement. Sembene n'est pas non plus exploré à fond, alors que ce personnage aurait pu être plus développé. En fait, ce personnage fait un peu quota minorité visible (aah, le sauvage taciturne...pfff...), et c'est bien dommage, il y avait des pistes à explorer dans les relations avec Malcolm.
Indépendamment de ça, il y a de nombreux moments très bien dans cette série créée par John Logan, à la fois en esthétique et dans le jeu des acteurs, de mise en scène.
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Il a un sourire un peu constipé, mais il a fait une bonne série !

Un gros merci à Fanch de me l'avoir conseillée, cette série, elle est top !

* * *
ATTENTION SPOILERS
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C'est là qu'on sort des généralités pour éventuellement échanger avec ceusse qu'ont vu cette deuxième saison !
Enfin une série où les aveugles, aussi jeunes et jolis soient-ils, peuvent aussi être des salauds ; si ce que les Putney feront de John Clare est assez vite inévitable et évident, le moyen qui est choisi pour piéger la créature est chouette. Enfin, chouette, on se comprend, hein ! Le passage où les Putney viennent définir les limites de leur nouvelle relation avec Clare les montre, lui dans une caricature de l'entrepreneur dénué de scrupules avec sa bonne face de bourgeois bon ton, elle névrotique de la répétition, inquiétante au fond.
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Un mec qui bricole habillé comme ça, avec cette petite moustache, ne peut qu'inspirer la méfiance
La folie joue un rôle important dans cette série : on l'a vu dans la première saison, avec une Eva Green au top, on le voit de nouveau lorsque Malcolm et Frankenstein se débattent, confrontés à leurs proches...Et si Malcolm ne peut plus, hors envoûtement, être mis en présence de sa famille, Frankenstein, lorsqu'il cherche à tuer Dorian Gray et sa troisième créature, voit sa folie s'ancrer dans la réalité...Il sera intéressant de voir ce qu'il devient dans la troisième saison.
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 Les plus belles cernes de la série !
Voilà, malgré les problèmes présents dans cette série (certaines transitions trop rapides, comme le coup où Frankenstein vient chercher Vanessa et Ethan dans la lande : on a l'impression qu'aucun délai ne s'est écoulé à Londres ; un loup-garou bof ; une ou deux grosses incohérences : pourquoi les sorcières ne se contentent-elles pas de zigouiller par surprise les gens dans le manoir de Malcolm ? Moi c'est ce que j'aurais fait ; pourquoi montrer le portrait de Dorian Gray ?), l'action reste bien menée, et il y a de nombreux moments que j'aime beaucoup : la valse ensanglantée de Dorian Gray et Lily (en fait tout le traitement autour de Gray - Lily - Angélique - Frankenstein est intéressant), les conversations Vanessa - créature, le bal ensanglanté (ça m'a fait penser à Carrie), le combat des sorcières, bien sûr, la mort de Sembene (c'est le seul moment intéressant de ce personnage, malheureusement), etc.
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 Bon, après, on se demande quand même comment ils font pour ne pas glisser


mercredi 14 octobre 2015

Un automne avec Vivaldi

J'ai toujours trouvé jusqu'ici que la partie automnale des fameuses Quatre saisons était la partie la plus chiante de l'ensemble - comme beaucoup, sans doute ; comparativement, par exemple, à l'été :


L'été m'était toujours apparu tellement riche, avec son alternance de langueur et de frénésie rappelant à la fois les fortes chaleurs propices à une sieste à l'ombre ou à une bière en terrasse et l'énergie apportée par le soleil, source de vie foisonnante et de joie de vivre. Le printemps, l'hésitante renaissance d'une Nature idéalisée, pleine du combat de la vie et l'hiver, qui débute par ces bourrasques dans la tension initiée par des violons nerveux, qui sont comme une bise persistante, avant le calme d'un matin d'hiver sur un lac gelé, et le retour du vent, opiniâtre. Mais l'automne ne m'avait jamais transporté, jusqu'ici.
Cependant, alors que je revenais d'un boulot de terrain, mon oreille a été l'autre jour accrochée par une émission de radio sur l'automne dans la musique classique, et je me suis passivement laissé embarquer dans l'émission (jusqu'au moment où ça a commencé à parler chasseurs, ils font vraiment chier jusque dans la musique ceux-là). Et donc, j'ai réécouté l'Automne (pas réentendu : réécouté) de Vivaldi et, finalement, j'ai ressenti cette journée de ballade dans l'été finissant, riche encore de lumières chaudes, et par moments pleine de gaieté, et non uniquement mélancolique ; une marche qui, parfois croise un vent porteur de feuilles mortes et semble suivre des yeux la course vive d'un écureuil dans les branches dénudées.


Alors, du coup, ça m'a réconcilié avec cet automne-là.

Je suis très loin d'avoir une culture étendue de la musique classique. Ce que j'en connais, très souvent, je ne le comprends pas et je m'ennuie: si je reconnais la perfection technique de l'ensemble (mais la virtuosité n'a jamais fait le talent), je ne suis que rarement touché par des airs classiques ; Mozart en est un très bon exemple. C'est très virtuose, mais ça me laisse souvent froid, à part quelques exceptions. Je pourrais changer d'avis si un jour l'envie me prend de creuser un peu son œuvre (je n'en ai pour l'instant aucune envie).
Mes goûts sont donc ceux d'un néophyte ; peut-être est-ce pour ça que j'aime bien les Quatre Saisons, peut-être est-ce une œuvre évidente à ressentir, mais quelque part, je m'en fous un peu.
J'aime bien l'élan de la 3ème symphonie de Mendelssohn (l'Ecossaise), la puissance du Requiem de Mozart (l'exception à la règle édictée plus haut, ici le Dies irae), la délicatesse toute en force d'Asturias d'Albeniz...autant de pièces qui n'ont rien à voir !
Je trouve, parfois, dans la musique classique, quelque chose avec quoi je suis en résonance, mais c'est assez rare, finalement. Parfois, cependant, lorsqu'on me met le nez dessus...Et c'est bien ce qui s'est passé avec cet automne. Il ne faut jamais dire jamais !

 


PS :  ça a moins de lien avec la musique classique, mais pour le plaisir...

vendredi 9 octobre 2015

Lettré, imbécile !

J'ouvre les yeux.

Je me vois dans l'eau d'un miroir qui me fait face. Mon crâne est translucide, et je devine mon encéphale derrière mes globes oculaires. En plongeant à travers le reflet des mes pupilles, je le regarde, et je constate que son volume se réduit, de manière presque insensible ; mais inexorable, néanmoins.
Dans le même temps, je sens mon acuité me fuir, du sable qui tombe à travers mes mains en coupe et s'éparpille dans les tourbillons d'un vent puissant.
Je suis seul, au sommet de la dune ; à perte de vue, rien, ni personne. Je veux parler ; je n'y parviens pas. Je tente de crier ; rien n'y fait.
Au-dessus de moi, un ciel lavé à l'encre de Chine ; de plomb, de plomb.
Sous mes pieds, le sable se dérobe, des idées qui s'enfuient, que je touche pourtant ! mais que je ne peux fixer et qui ne me supportent plus. Elles fuient, elles ne me soutiennent plus.
Je traverse une montagne de sable, pour atterrir dans une officine grise, je m'y écrase, je m'aplatis.
Ma colonne vertébrale est molle, ce qui a le double avantage de me permettre de me courber sur les livres et devant mes congénères. Faible, non par les lettres mais en dépit d'elles, je parle néanmoins haut pour n'en rester pas moins bas, vide, creux.

Oh, je sais des choses, mais les entrepose dans mon grenier crânien, où un plancher instable supporte des monceaux de choses oubliées sous une couche de scories.
Je suis un lettré sans pensée. Lettré, imbécile !

Je ferme les yeux et je me lève pour la journée.

* * *

Depuis un moment maintenant, les mots et les idées me fuient ; les mots, ces fascinants outils, vecteurs, et plus souvent peut-être qu'on ne pourrait le croire, initiateurs de la pensée. Je me sens à côté dans mes propos, en décalage par rapport à ceux qui m'entourent. Lettré (un peu), mais imbécile !
Heureusement, de temps en temps, surviennent de ces petits évènements, de ces petites coïncidences amusantes qui remettent un peu d'allant dans la grisaille qui m'obscurcit l'esprit. Ainsi, alors que je relis De Cape et de Crocs, puis que je parlais un peu de Cyrano ici ces derniers jours, j'ai entendu ce matin à la radio une interview de Jean-Paul Rappeneau, qui l'a mis en scène à l'écran. Dans ce film, Depardieu est formidable, et si je ne dois garder qu'un souvenir de lui ce sera peut-être celui-là (je retiendrai peu de chose de ses propos hors écran par exemple).
Pour le plaisir, quelques extraits mémorables :



 

Le reste du film est à l'avenant, et se découvre avec délectation !